Simuler c’est négocier :
Ça ne vous a surement pas échappé mais ces derniers
temps la faculté de droit foisonnent d’initiatives et de projet étudiants de
toutes formes et pour toutes les envies. Beaucoup d’étudiants cette année
s’investissent dans différents projets et essayent d’entrainer avec eux une
bonne partie des auditoires, et c’est tant mieux. Rien que cette année, on a eu
la possibilité de partir à Salzburg, à Exeter, à Venise, rejoindre le tout
nouveau Centre de Droit humanitaire (relancé par des étudiants), de participer
à différentes simulations, faire des formations, suivre des conférences,
plaider devant la Cour de Cassation ou devant une Cour international et j’en
passe. Aujourd’hui, nous avons envie de mettre à l’avant plan, une des initiatives
étudiantes qui rencontre le plus en plus de succès : le projet LIMUN.
Amalia Rodriguez (MA1), Valentin Jadot (BA3) (et di fond du local Anis Farvaque
(MA1 Sc-Po)) ont bien voulu nous
présenter ce projet à la tournure plus qu’international.
L.N : Alors avant de commencer, pouvez vous nous
expliquer ce qu’est la LIMUN et en quoi cela consiste ?
A.R :
LIMUN ça veut dire London International
Models United Nations et c’est une simulation de négociations de l’ONU par
rapport à des thèmes particuliers d’actualité. Le principe est assez
simple : des étudiants de tous horizons se réunissent dans une très belle
université à Londres, se divisent en plusieurs comités (identiques à ceux qui
existent à l’ONU) et ils y simulent des négociations internationales entre
diplomates de chaque pays. Cette année, la délégation de l’ULB ne comptait pas
moins de 15 membres, un record.
V.J :
La particularité aussi de ces négociations c’est que chacune des délégations
étudiantes qui se rendent à la LIMUN représente, non pas son pays d’origine,
mais un autre pays membre de l’ONU, à
charge ensuite à la délégation de se répartir dans plusieurs comités afin d’y
représenter le pays qui lui a été attribué.
C’est un grand jeu de rôle international organisé par et pour des étudiants.
A.F :
Ces activités de simulation de négociations et de diplomatie sont typiques de
la culture anglo-saxonne, et donc assez peu connues chez nous, mais là-bas
c’est un peu une tradition d’y participer, une sorte de grand tournoi
intellectuel, et c’est impressionnant de voir comment « ce jeu » est
pris au sérieux par les étudiants.
N : Je suppose qu’une tel aventure ne s’improvise
pas comme ça à la légère et que vous avez du vous préparer avant de
partir ?
A.R :
Oui bien sûr, c’est essentiel. Les délégations reçoivent avant de partir à la
LIMUN les sujets qui vont être traités dans chacun des comités, tout le travail
qui a été fourni là-bas sur place par notre délégation, vient d’un travail
collectif du groupe qui, en dehors des heures de cours, ont travaillé sur leurs
sujets et se sont renseignés sur la situation géo-politico-juridique de leurs
pays, et ce sans aide extérieure
V.J :
Cette année, Mister Best, le nouveau professeur d’anglais de la faculté est
venu nous aider pour le coté linguistique de l’aventure. Cela dit, pour le
reste, ce sont les membres de la délégation qui prennent en main aussi bien
l’organisation du voyage que la préparation des « topics » de
discussion et la familiarisation avec les « rules of procedures ».
AR :
En parlant de Mister Best, il faut signaler qu’il faut avoir un petit bagage en
anglais, car une fois sur place tu as beau préparer ce que tu veux, la plupart
du temps tout se fera à l’improvisation, il faut se lever et s’imposer sur des thèmes vraiment pas faciles
(de la géo-politique en anglais je te laisse imaginer), tu dois vraiment
imposer ton style, et avoir une certaine forme de rhétorique, il y a même plus
de forme que de fond à la LIMUN, c’est comme du théâtre.
N : mais organiser une pareille expédition, est
ce que ça ne coute pas trop cher ?
A.R :
Non pas du tout, ça coute surtout beaucoup de temps, car il y a des réunions
hebdomadaires durant lesquels nous faisons le point sur nos recherches, et
cette année, nous avons reçu les sujets qui allaient faire l’objet des
simulations juste avant les examens de janvier, donc on peut te dire qu’on n’a
pas chômé.
V.J. :
C’est vrai que ça doit aussi se préparer pendant le premier quadri,
parallèlement aux études. Ce n’est pas un énorme défi non plus ; cela
représente un certain investissement personnel mais je pense que personne n’a
jamais regretté le temps qu’il y a consacré !
A.F. : et notons que ce voyage a aussi
été possible grâce à l’aide financière de l’ADBr, du Bureau étudiant et du
Cercle de Droit.
N : Mais alors quel est le parcours type d’un
participants à la LIMUN ?
VJ :
Quand on s’inscrit, on nous attribue un pays (par rapport à la taille de la
délégation), par exemple cette année la délégation de l’ULB représentait Les
Philippines et le Canada, puis on reçoit la liste des différents comités et
donc à charge pour nous de nous répartir dans chacun de ses comités (un
étudiant de la délégation de l’ULB par comité),
et d’y représenter le mieux possible, le pays qu’on nous attribué, nous
recevons en même temps les sujets qui seront développés dans le comité de l’ONU
choisi par l’étudiant.
AR :
Tu reçois deux sujets que tu vas devoir aller le défendre dans un faux-comités
de l’ONU, mais qui existent dans la réalité, moi par exemple j’étais dans le
comité simulant les négociations à l’UNESCO et Valentin était dans le
comité : WORLD BANK. Ce qui est aussi très chouette dans le LIMUN, c’est
cette sorte d’enquête que chaque étudiant pour mieux connaître son pays, où il
n’a jamais mis les pieds, et puis d’aller le défendre dans le comité, ce qui
implique donc de connaitre l’actualité de ce pays sur le bout des doigts.
L.N : Qu’apportent les études de droit dans cette
simulation ?
VJ :
Le droit t’apporte un point de vue
juridique de la négociation, étant en droit tu sais déjà plus ou moins
quels sont les organes compétents de l’ONU pour tel matière, les compétences
des divers cours et tribunaux internationaux, on peut mieux recadrer les débats
de ce points de vue là, et parfois même amender des solutions qui ne tiennent pas
la route (ex : CEDH compétente hors des pays membres du Conseil de
l’Europe, etc.). Il faut savoir que dans ce genre de concours, étonnamment, il
y a peu de juristes qui font des simulations dans la culture anglo-saxonne. Ce
sont plutôt des scientifiques style chimistes, biologiste. Outre-manche, la
LIMUN est une expérience très valorisante, c’est un véritable tournoi, un grand
jeu de rôles, vrai realpolitik, où,
quelque soit les études que tu fasses, tu dois apprendre à placer tes pions et
construire des alliances, tenter de convaincre pour influencer la résolution
finale.
A.F :
moi étant en sciences-po, je pense que les études qu’on est en train de suivre
n’apportent pas grand chose, mais c’est la LIMUN qui t’apporte une vrai
formation de négociateur, et ça t’apprend à faire passer des choses qui sont, à
première vue, impossible à faire passer,
AR :
pour moi ça apporte plutôt l’esprit d’équipe, même si on se prépare
individuellement, on est toute une équipe à aller là-bas et les plus
expérimentés sont là pour aider les petits nouveaux. Il y a donc une grande
motivation, un bon esprit d’équipe et un soutien moral, car quand on va là-bas
on se prend une bonne petite claque dans ta première négociation.
L.N : Comment se vit la LIMUN ? Comment ça
se passe une fois arrivé sur place.
R :
on a passé 4 jours à Londres, et 3 jours en négociation, mais ce sont des
journées complètes de 9h à 18h
VJ :
Ce sont des journées très intenses, il faut imaginer qu’Il y a à peu près une
cinquantaine de personne dans chaque comité, ça va du plus petit, du conseil de
sécurité de l’ONU (15 personnes) et 100 pour le plus grand comité. Le but est
d’arriver à ce que le comité se mette d’accord sur un texte à l’issue des 3
jours de négociations, et de trouver une solution à un problème international
auxquels les diplomates des Nations Unies n’ont pas encore trouvé de solutions.
Il y a d’ailleurs un mythe qui dit que certaines des véritables résolutions
sont adoptées sur base des textes adoptés dans les différentes MUN. Le truc à la LIMUN, c’est qu’on représente un
pays, il faut savoir quel est la taille de ce pays au niveau international, il
faut donc placer ces pions de tel manière que le texte finalement adopté par le
comité conviennent aux idées du pays que je représente. Tu ne peux jamais
parler en ton nom propre, toujours par rapport à ton pays.
AR :
donc par exemple à la simulation de l’UNESCO, on avait deux thèmes a préparer,
le premier concernait la liberté d’expression dans les nouveaux types de
médias, et le deuxième qui était la problématique de la reprise de
l’enseignement après des conflits armés, et c’est vraiment au début du comité qu’on a choisi l’ordre du jour. Et puis on
discute, on négocie pour tenter d’arriver finalement à un texte qui nous mets
tous d’accord (enfin la majorité des membres du comité). Bien sûr à la fin on
vote oui ou non en fonction de la position géopolitique du pays qu’on défend.
L.N : Qu’avez-vous pensé de la prestation des
autres délégations présentes, et plus particulièrement de la délégation
belge ?
VJ :
La Belgique n’était pas vraiment représenté dans ces comités, elle n’a pas
vraiment de poids important dans la négociation. C’est d’ailleurs beaucoup plus
amusant de défendre un autre pays que ton pays d’origine, cela nous a permis de
voir des choses très drôles comme la Corée du Nord et la Russie, par exemple,
qui n’hésite pas à jouer leur rôle à cœur, notamment face aux USA, etc.
AR :
dans mon comité, il y avait le représentant d’Israël et de la Palestine, qui
n’ont pas arrêtés de se clacher mais à la fin de toutes les négociations, la
délégation de Palestine a reconnu officiellement l’Etat d’Israël, et puis, ils se sont fais une accolade, comme
quoi les dirigeants devraient prendre exemple sur ce qui se passe à la LIMUN.
AF :
et les socials event, on n’en parle pas ?
L.N : Anis, c’est moi qui pose les
questions !
A.F. :
Désolé
L.N : Bon ça c’est la journée, mais le soir ça
devait être autre chose ?
VJ :
pour caricaturer, ils y a les super-entrainés qui potassent le soir, pour être
encore plus prêts le lendemain pour négocier, n’hésitant parfois pas à y
consacrer des nuits blanches entre deux journée de négociation. Et puis il
y a les 99% autres qui sont contents de se rencontrer et de parler un peu
d’autre chose le soir venu…
AR :
La journée on négocie et le soir ce sont
de soirées où toutes les délégations peuvent passer la soirée ensemble, boire
un verre en dehors du comité et donc rencontrer des personnes de tout horizon
et certaines peuvent en profiter pour créer des alliances dans leurs comités.
C’est un jeu, on est là pour s’amuser, et les socials events permet justement d’un peu décompresser.
L.N : Et maintenant quel est l’avenir de la LIMUN
à l’ULB, que projetez-vous ?
VJ :
On s’est agrandi et l’équipe LIMUN marche plutôt bien, mais ce que l’on
voudrait c’est vraiment faire partager à l’ensemble de la faculté de droit la
logique des MUN et l’envie de faire des simulations de ce type, car c’est une
expérience enrichissante, intéressante, il faut transmettre cet esprit à l’ULB.
AR :
il faut noter que nous allons bientôt faire une grande conférence pour
l’ensemble de la faculté, afin d’expliquer comment marche la LIMUN et il y aura
un thème spécifique qui sera axé sur la diplomatie. Donc n’hésitez pas à
venir pour entendre toutes les informations disponibles, ainsi que sur toutes
les démarches à suivre pour entrer et participer à une MUN.
Quelqu’un m’a dit quand je suis arrivé à l’université,
qu’à l’ULB il n’y a pas que les cours et la guindaille, qu’il y a plein
d’autres chose à faire, et le projet LIMUN en fait partie, Les Novelles ne
peuvent que vous encourager à suivre cette initiative étudiante qui mélange à
la fois jeu, politique, droit, pouvoir, négociation et bonne humeur. N’hésitez
pas non plus à contacter les membres de la LIMUN (limun.ulb@gmail.com) et surtout
allez vous renseigner à la prochaine conférence de nos « ambassadeurs »
afin de vous aussi, vous jeter dans cette aventure… so british.
La délégation ULB 2011-2012 |
Par Mathieu Dekleermaker
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